Le petit tas noir

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Il y a dans ma main ce petit tas noir, cette petite chose qui bat et que je regarde sans en comprendre le réel fonctionnement. Je me demande s'il est vraiment bon d'y conserver autant de marques. Autant de cicatrices. Marqué par le temps, les efforts et les évènements, mon coeur se creuse et s'entaille, continuant malgré tout ce pourquoi il a été créé. Quand j'appuie sur certaines blessures, un liquide vif en sort. Il a le goût de l'amertume. Il y a des noms qui me viennent, et avec, un nombre incalculable d'images, de paroles, de gestes ; des souvenirs qui me font l'effet d'un meurtre. Je ne comprends pas pourquoi certaines choses ne s'oublient jamais, car leur dernière utilité est de me faire souffrir. Quand je vois ce sang rouge et chaud couler le long de mes mains, je me dis que ça a été une erreur de confier mon coeur à ces gens-là, et pourtant je croyais vraiment bien faire sur l'instant. Plus que des trahisons, ce sont des crimes. Des génocides. Des exterminations. Plusieurs parts de moi sont mortes en même temps que ces relations auxquelles je croyais et auxquelles je donnais une importance presque divine. Ces marques sur mon coeur ne s'effaceront jamais car je conserve les images, les paroles et les gestes de chaque personne que j'ai aimée dans un coin de ma tête, sans jamais pouvoir en faire entièrement le deuil. Mais est-ce réellement bon de garder autant d'amertume...? Non, en fait je chéris chaque plaie de mon coeur comme s'il s'agissait de la plus pure des créations ; je suis humaine, j'aime, et je veux avoir des souvenirs. Je suis marquée à vie. Mon petit tas noir, chétif et ramolli dans ma main, je le replace contre ma poitrine alors que de mes yeux coulent deux filets étincelants. Je ne veux jamais oublie les gens qui ont compté, quitte à ne garder d'eux que ces infâmes cicatrices douloureuses.

Yumemi Gokochi BOY (dl)
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